Eric Gozlan et Paul Manandise ont entamé le processus pour le retour des enfants kidnappés par la russie , sur le territoire de l’Ukraine
Enfants volés, enfances brisées : le drame des enfants ukrainiens déportés par la Russie
Depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, une tragédie silencieuse et insupportable se joue sous les yeux du monde. Des milliers d’enfants ukrainiens ont été arrachés à leur famille, déportés en Russie, placés dans des foyers d’adoption ou enfermés dans des camps de « rééducation ». Un crime d’une ampleur historique, un crime contre l’humanité qui se déroule dans un silence assourdissant.
Des déportations organisées et systématiques
Derrière les discours officiels du Kremlin se cache une réalité glaçante : ces enlèvements massifs ne sont pas des actes isolés, mais bien un programme organisé, orchestré avec une logistique d’État. Selon une étude de l’université de Yale, au moins 19 546 enfants ont été identifiés comme déportés en Russie ou dans les territoires occupés. L’objectif est clair : les couper de leur identité, de leur langue, de leur culture, de leur famille, afin de les transformer en Russes.
Le 30 mai 2022, Vladimir Poutine a signé un décret permettant d’accélérer l’adoption d’enfants ukrainiens en Russie. Une simple signature pour effacer une vie, une filière administrative qui déshumanise ces enfants et complique leur retour.
Des témoignages glaçants
Les rares enfants qui ont pu être rapatriés en Ukraine racontent un enfer. Diana, 15 ans, a été envoyée de force dans une colonie de « vacances » en Crimée, où elle a passé six mois loin de sa famille. « On était obligés d’apprendre l’hymne russe, d’étudier l’histoire sous un angle totalement biaisé. Certains de mes amis ont été adoptés et je ne sais pas s’ils reviendront un jour. »
Vitali, 16 ans, a vécu l’endoctrinement forcé : « On nous a répété que l’Ukraine n’avait plus besoin de nous, que nous étions des enfants d’un pays terroriste. Une fille avait un petit drapeau ukrainien, ils l’ont brûlé sous nos yeux en disant : ‘Regardez, on met le feu à votre pays’. »
Un crime de guerre impuni
Le 17 mars 2023, la Cour pénale internationale a émis un mandat d’arrêt contre Vladimir Poutine et Maria Lvova-Belova, la commissaire russe aux droits de l’enfant, les accusant de « déportation illégale d’enfants ». Pourtant, aucune action concrète ne semble mettre un terme à ce drame.
La Cour pénale internationale (CPI) a clairement indiqué que ces actes constituent une violation grave du droit international, en particulier des Conventions de Genève qui interdisent expressément la déportation de populations civiles, et plus encore celle des enfants. Selon la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, adoptée par l’ONU en 1948, enlever des enfants pour les assimiler à une autre nation est un acte constitutif de génocide. Cela signifie que la Russie de Poutine ne se livre pas seulement à une guerre d’agression, mais à une tentative d’effacement d’une génération ukrainienne.
L’Organisation des Nations Unies (ONU), l’UNICEF, l’Union européenne et plusieurs organisations internationales ont dénoncé ces pratiques et appelé à la restitution immédiate des enfants à leurs familles. Mais ces déclarations restent insuffisantes. Les condamnations verbales ne suffisent plus. Il est impératif que des mécanismes de sanctions plus sévères soient mis en place pour forcer la Russie à rendre ces enfants et à mettre fin à ces pratiques criminelles.
Une mobilisation nécessaire
Les gouvernements occidentaux et les organisations internationales doivent se mobiliser sans relâche pour ramener ces enfants en Ukraine. Chaque enfant enlevé est une famille brisée, une identité niée, un droit bafoué. Nous ne pouvons pas rester spectateurs d’un crime qui rappelle les heures les plus sombres de l’histoire.
Les pressions diplomatiques doivent s’intensifier, les gouvernements doivent exiger des sanctions ciblées contre les responsables de ces déportations et adopter des stratégies efficaces pour retrouver ces enfants. La justice internationale doit agir rapidement, et les juridictions nationales doivent ouvrir des enquêtes pour poursuivre les complices de ces crimes.
L’Ukraine, soutenue par la communauté internationale, a déjà entrepris des actions pour retrouver et rapatrier ces enfants. À ce jour, 388 enfants ont pu être ramenés en Ukraine, mais cela ne représente qu’une infime partie des victimes. Ce combat est loin d’être terminé.
L’indifférence est une complicité. L’Histoire jugera ceux qui se sont tus. Il est encore temps d’agir. Chaque jour compte, chaque action peut sauver une vie. Il est de notre devoir de ne pas détourner le regard et d’exiger justice pour ces enfants volés.
Eric Gozlan, directeur du Conseil international pour la diplomatie et le dialogue
